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Hospitalités. Avons-nous un monde pour accueillir d’autres mondes?

Théâtre de L’Échangeur, le 19 mai, à 19h.
Il n’y a pas un problème avec la migration en France. C’est la France qui est un problème. Comme d’autres États, ailleurs. Le cri de ralliement des luttes des « sans papiers » des années 90 pourrait nous servir ici d’exergue: « Étrangers, ne nous laissez pas seuls avec les Français! »

Il n’y a pas un problème avec la migration en France. C’est la France qui est un problème. Comme d’autres États, ailleurs. Le cri de ralliement des luttes des « sans papiers » des années 90 pourrait nous servir ici d’exergue: « Étrangers, ne nous laissez pas seuls avec les Français! »

Car la question de « la gestion » des migrations, la définition du migrant, est au cœur de la gouvernementalité. Comme fabriquer un corps social, composé d’identités sociales, des sujets à gouverner sans les inscrire dans un espace d’appartenance dont le « nous » de l’inclusion est inséparable de l’exclusion des « autres »? Mais qui sont ces autres d’un « nous » défini par la puissance nationale-étatique ?

Le nous qui surgit des formes de communauté vivantes ne peut exister que dans des rapports à ce qui lui est étranger (et qui le fait différer). Il est alors impératif de refuser le nous institué dans le fondement fictionnel de l’État-nation. Mais que la nature de l’État soit fictionnelle, qu’elle se soutienne des légendes des origines, cela ne neutralise en rien sa violence. Car c’est même cette fiction de l’identité qui donne sa légitimité aux brutales créations de frontières, à la hiérarchisation entre les citoyens (nationaux) et les autres. Tellement « autres » qu’il peuvent mourir par milliers noyés dans la mer ou croupir sous des échangeurs autoroutiers. Dans d’autres temps, nous trouvâmes là un des ferments des fascismes. Dans le décor actuel de décomposition de la scène politique, leur spectre est de retour.

Contre la violence des polices du social et ses identités, contre la fabrique des nouveaux gueux, des formes de communauté se réinventent. Nous ne le rappellerons jamais assez: toute communauté existe et devient dans des rapports permanents avec des mondes hétérogènes. Avons-nous encore un monde pour accueillir d’autres mondes? Si ce n’est pas le cas, nous devons à nouveau le fabriquer. Les solidarités, l’entraide, les nouvelles amitiés en détermineront la possibilité.

Avec Karine Parrot, juriste, membre du GISTI, autrice de Carte blanche. L’État contre les étrangers, paru aux Éditions La Fabrique en 2019, nous nous pencherons sur une généalogie du droit contre les étrangers qui est simultanément celle de la création de la fiction toxique de l’identité nationale. Elle nous fera part de ses recherches sur la profusion d’un droit qui n’hésite pas à bafouer ses propres justifications.

Océane Marache et Pierre Mathurin nous présenteront l’histoire et les actions d’Utopia 56!, association d’aide aux migrants, qui compte plus de 16 000 adhérents et mène des actions sur tout le territoire. Celles-ci, ont su articuler des pratiques de soutien et de solidarité concrètes avec des formes d’effraction dans l’espace public autour d’occupations, s’associant avec le Collectif Réquisitions.

Camille Louis philosophe, dramaturge, autrice de La conspiration des enfants, publié aux Presses universitaires de France en 2021, et active sur les terrains violentés de l’exil (plus spécifiquement Calais, Athènes et Lesbos) présentera la manière dont, dans ces zones de l’immonde fabriquée par la police européenne (dite politique migratoire), des mondes se trouvent et s’inventent au croisement des gestes d’entraides entre locaux et étrangers qui œuvrent en commun.

Cette rencontre rentrera en résonance avec le travail de création de Soeuf Elbadawi, présenté aussi à L’Échangeur, qui porte sur les fabriques de la clandestinité des politiques néo-coloniales françaises en Afrique. Nous compterons aussi avec la présence des collectifs La Casa, Les Petits Dej’ de la Chapelle, l’association Coucou Crew à La Station Gare des Mines qui nourriront nos échanges avec leurs expériences d’accueil et de solidarités.

Nous nous retrouverons au Théâtre de L’Echangeur (à Bagnolet), le jeudi 19 mai 2022 à 19h. C’est accessible en métro, bus ou tramway : de plus amples informations pratiques disponibles sur le site du Théâtre.
Nous vous prions, en raison de la jauge de présence imposée aux lieux culturels publics pour cause de Covid-19, de nous faire savoir votre présence par retour de mail.