Chères amies et chers amis,
Cela faisait quelques semaines que l’on se disait qu’il fallait faire une sorte de point d’étape sur les différents chantiers des Communaux. C’était sans compter sur le vertige des derniers événements « mondiaux ». Décidément ce monde à l’agonie ne veut pas laisser sa place à d’autres mondes sans multiplier sa violence. Alors les Communaux ?
Ce serait assez dérisoire, ici, en quelques mots, de prétendre proposer la moindre analyse ajustée de la situation que nous vivons. Mais il nous semble impossible, même dans le cadre modeste de nos actions, de passer sous silence la dernière accélération du désastre.
Certains et certaines parmi nous ne voulons pas faire semblant de continuer à mener nos « affaires », paisiblement, plus ou moins laborieusement, sans acter notre colère lorsque nous sommes sommés de faire le choix entre des « alternatives infernales ».
Face à l’expansionnisme d’une anachronique Grande Russie avec ses psychopathes, choisir le « camp de la démocratie » représenté par les USA et l’atlantisme. Choisir au nom de la liberté, devant l’effroi du méga-business chinois et sa cybernétique harmonieuse, l’empire américain crépusculaire et son modèle de désagrégation sociale. Ou choisir encore la Vieille Europe, terreau des Lumières ayant prétendu éclairer le monde, sans oublier ses deux Guerres mondiales, ses fascismes qui sont de retour, sa Shoah, son Front de modernisation ravageant le monde, ses entreprises coloniales sanguinaires. Au nom du dégoût et de l’effroi face à la brutalité d’un sociopathe bunkérisé, face aux atrocités de l’armée russe en Ukraine, (mais il y eut « ailleurs » d’autres atrocités récentes : la Syrie, cela nous dit-il encore quelque chose?), choisir l’humanisme nord-américain, celui de l’OTAN et de leurs alliés, cette même « coalition internationale » des deux guerres en Irak. Choisir enfin la police de pacification française, avec ses frappes « égarées » décimant des mariages au Mali, ses louches affaires en Libye, son ancien soutien aux génocidaires rwandais…
Entre-temps, pour en revenir à nos contrées de moins en moins éloignées du bruit des explosions des missiles, on proclame avec emphase le généreux accueil par l’État français des ukrainiens fuyant la guerre, en même temps que sa police continue à lacérer les tentes des réfugiés à Calais et à Paris, qu’il laisser se noyer des migrants basanés dans la mer. Rien ne nous sera épargné: ainsi Anne Hidalgo, avec des trémolos dans la voix, déclarant que Paris, la « ville-refuge » comme chacun le sait, va ouvrir des centres d’accueil pour les nouveaux réfugiés, alors même que depuis des années elle laisse croupir dans d’ infects campements des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants.
Il faut savoir choisir ses gueux, ses spectacles de misère et ses morts.
Mais nous sommes nombreuses et nombreux à ne pas vouloir choisir leurs choix. A ne plus pouvoir souffrir cette veulerie. A ne plus supporter de voir parader Macron dans son décor républicain vermoulu, l’éborgneur de ceux qui se révoltent, le fossoyeur de l’hôpital en pleine pandémie, son néo-thatchérisme déglingué et brutal, ses pass sanitaires et ses auto-attestations, ses couvre-feux et ses conseils de défense pour nous protéger d’un virus.
Entretemps, on avait fini par presque l’oublier, le dernier rapport du GIEC ne nous parle plus de « réductions des gaz à effets de serre ». Mais de s’adapter aux catastrophes en cours. Ils ont failli passer à la trappe nos experts intergouvernementaux…
Maigre consolation, il semblerait que les bourses mondiales sont en train de s’effondrer…
Alors avec Les Communaux, nous voulons continuer à ne pas choisir leurs choix. Mais à prendre le parti des vies communes, faites de rencontres avec ce qui diffère, contribuer à leur forger des cheminements, faits d’affirmations et de révoltes malgré les effondrements.
Alors, aussi insignifiant que cela puisse paraitre, voici donc quelques nouvelles et rendez-vous :
– Le 14 mai à partir de 10 heures, au théâtre de L’Échangeur à Bagnolet pour la journée « Pour une écologie des pratiques de soin ». Nous y explorerons, avec de nombreux et nombreuses invitées, des manières de fabriquer des interdépendances et de prendre soin des fragilités dans des contextes de grande précarité. Il s’agira par là de dessiner un paysage de formes d’entraide dans et en dehors des institutions spécialisées. Parfois contre elles.
– Le 19 mai, toujours au théâtre de L’Échangeur, à 19h. nous nous retrouverons autour de « Hospitalités, migrations: métamorphoser nos mondes ». Avec Karine Parrot, Utopia 56, Camille Louis. Il y sera question d’une généalogie du droit français contre les étrangers, des pratiques actuelles d’hospitalité et de solidarités avec des migrants, de la situation en Grèce comme exemple de la sous-traitance de la violence faite aux migrants, mais aussi du foisonnement de formes de résistance. Cette rencontre sera liée au travail de création de Soeuf Elbadawi, présenté aussi à L’Échangeur, qui porte sur les fabriques de la clandestinité des politiques néo-coloniales françaises en Afrique.
– Le 4-5 juin, aux Murs à Pêches de Montreuil, en association avec la Fédération des Murs à Pêches et d’autres collectifs franciliens (Les Jardins des Vertus d’Aubervilliers, L’Autre Champ à Villetaneuse, la coordination des écologies populaires, des brigades de solidarité et des cantines populaires…) et avec la participation de la chercheuse Flaminia Paddeu, nous proposerons pendant deux jours une série de rencontres autour des communs des terres urbaines et des subsistances. Moment d’exploration, de partage et de liaison entre des pratiques de réappropriation des terres urbains et de luttes pour les défendre.
– Le 9 juin, à 19h au théâtre de L’Échangeur, nous proposons la rencontre « Démanteler les réseaux, refonder des liens techniques« avec Fanny Lopez. Et avec la participation de Jean-Baptiste Vidalou et du collectif La Chose.
Toutes ces rencontres feront l’objet de présentations détaillées à l’approche des dates. Elles sont le résultat du travail en cours depuis des mois autour de ce que nous avons appelé les « chantiers » des Communaux.
Ajoutons que parmi nos chantiers, nous sommes en train de travailler au projet d’une « Mutuelle sauvage » pour pouvoir soutenir des expériences d’entraide et de coopération fragiles. Nous comptons organiser une rencontre publique en septembre à ce propos.
Également, nous sommes en train de préparer une rencontre autour de la puissance destituante du communalisme. Nous vous en donnerons aussi des nouvelles.
Enfin, nous proposerons bientôt la date d’une rencontre publique pour partager l’ensemble de ces initiatives.
Bien amicalement,
Les Communaux.
PS: une fois encore fait coutume, nous vous invitons à faire un don aux Communaux, ponctuel ou mensuel. C’est ici.